32

 

Pitt se gara dans le parking de la N.U.M.A. et alla s’enfermer dans son bureau. Il réfléchit quelques minutes puis appela Los Angeles sur sa ligne privée. A la cinquième sonnerie, une femme répondit :

« Agence Casio.

— Je voudrais parler à Mr. Casio.

— De la part de qui ?

— Pitt. Dirk Pitt.

— Il est avec un client. Vous pouvez rappeler ?

— Non ! répliqua Pitt d’un ton menaçant. Je téléphone de Washington et c’est urgent. »

Impressionnée, la secrétaire se ravisa :

« Un moment, je vous prie. »

Casio vint presque aussitôt en ligne :

« Mr. Pitt, ravi de vous entendre.

— Désolé de vous avoir dérangé, mais j’aurais quelques précisions à vous demander.

— Allez-y.

— Que savez-vous de l’équipage du San Marino ?

— Pas grand-chose. J’ai fait une enquête sur les officiers, mais je n’ai rien déniché. C’étaient tous de respectables membres de la marine marchande. Le capitaine, si je me souviens bien, avait un excellent dossier.

— Aucun lien avec une quelconque organisation criminelle ?

— Pas d’après les ordinateurs de la police.

— Et le reste de l’équipage ?

— Sans intérêt. Peu d’entre eux étaient fichés.

— Nationalité ? demanda Pitt.

— Nationalité ? répéta le détective en réfléchissant. Un mélange. Quelques Grecs, quelques Américains et aussi des Coréens, je crois.

— Des Coréens ?  (Pitt tressaillit.) Il y avait des Coréens à bord ?

— Oui. Maintenant que j’y pense, je me rappelle qu’un groupe d’une dizaine avait été embauché avant le départ du bateau.

— Croyez-vous qu’il soit possible de retrouver sur quels bâtiments ils avaient servi avant le San Marino ?

— Ça remonte à loin mais les documents doivent encore exister.

— Vous pourriez y ajouter l’équipage du Pilottown ?

— Sans doute. Mais qu’espérez-vous découvrir ? demanda Casio.

— Vous ne voyez pas ?

— Un rapport entre l’équipage et notre société mère inconnue, c’est ça ?

— A peu près.

— Et vous voulez des renseignements datant d’avant la disparition du San Marino, fit le privé d’un ton songeur.

— Le plus pratique pour s’emparer d’un navire, c’est par l’intermédiaire de l’équipage, non ?

— Je croyais que la dernière mutinerie avait été celle du Bounty. Enfin, je vais voir ce que je peux faire.

— Merci, Mr. Casio.

— Vous pouvez m’appeler Sal.

— Okay, Sal. Moi, c’est Dirk.

— Bien. Je m’en occupe et je vous tiens au courant, Dirk », conclut le détective en raccrochant.

Pitt se radossa dans son fauteuil et posa les pieds sur son bureau. Il reprenait confiance. Il était sûr que son instinct ne le trompait pas. Il avait maintenant un deuxième coup de téléphone à donner. Il consulta un annuaire et composa un numéro.

« Université de Pennsylvanie, département d’anthropologie, je vous écoute.

— Pourrais-je parler au professeur Grâce Perth ?

— Un instant.

— Merci. »

Pitt patienta près de deux minutes puis une douce voix féminine fit :

«Allô !

— Professeur Perth ?

— Oui.

— Je m’appelle Dirk Pitt, directeur des projets spéciaux de la N.U.M.A. Pardonnez-moi de vous déranger, mais auriez-vous le temps de répondre à quelques questions d’ordre professionnel ?

— Que désirez-vous savoir, Mr. Pitt ?

— Eh bien, voici : si l’on prend un homme de trente à quarante ans, taille et poids moyens, natif de Pékin et un autre répondant au même signalement, mais natif de Séoul, comment peut-on les différencier ?

— Ce n’est pas une plaisanterie, Mr. Pitt ? »

II éclata de rire.

« Non, professeur, la rassura-t-il. Je suis tout à fait sérieux.

— Voyons, fit-elle en réfléchissant. En gros, les gens d’origine coréenne ont tendance à être plus classiques, ou à l’extrême de type mongol. Les Chinois, eux, ont des traits généralement asiatiques. Mais je ne me risquerais pas à émettre un avis parce que les chevauchements sont trop grands. Il serait beaucoup plus facile de les juger à leurs vêtements, leur comportement, bref à leurs caractéristiques culturelles.

— Je pensais qu’ils avaient des particularités faciales permettant de les reconnaître, comme les Chinois et les Japonais par exemple.

— Oui, mais dans ce cas la distribution génétique est plus évidente. Si votre homme a une barbe assez fournie, il y a de fortes chances pour qu’il soit japonais. En revanche, pour ce qui concerne les Chinois et les Coréens, vous avez affaire à deux groupes raciaux qui se sont mélangés pendant des siècles, ce qui a tendu à effacer toute véritable distinction.

— C’est donc sans espoir ?

— Peut-être pas, mais pour le moins difficile, répondit l’anthropologue. Une série de tests de laboratoire aiderait sans doute.

— Je ne dispose que d’un signalement.

— Vos sujets sont vivants ?

— Non, ce sont des noyés.

— Quel dommage ! Un individu vivant présente certaines expressions faciales acquises culturellement qu’on peut analyser. On parvient parfois sur cette seule base à une hypothèse probable

— Malheureusement, ce n’est pas possible.

— Vous pourriez cependant essayer de me décrire leurs traits, Mr. Pitt. »

Il hésita, ne tenant pas à revivre cette scène de cauchemar, mais il finit par fermer les yeux et commencer à dépeindre les visages des cadavres qu’il avait vus dans l’épave de l’Eagle. Soudain, il s’interrompit.

« Je vous en prie, continuez, fit le professeur Perth.

— Je viens de me rappeler quelque chose. Deux des morts avaient un système pileux développé. L’un portait une moustache, l’autre un bouc.

— Intéressant.

— Ils n’étaient donc ni coréens ni chinois ?

— Je n’ai pas affirmé cela.

— Que pouvaient-ils être sinon japonais ?

— Vous sautez un peu trop vite aux conclusions, Mr. Pitt, fit-elle comme si elle s’adressait à l’un de ses étudiants. Les traits que vous m’avez décrits indiquent une tendance certaine au type mongol.

— Mais la barbe ?

— Il faut considérer l’histoire. Les Japonais ont régulièrement envahi la Corée depuis le XVI° siècle. Et de 1910 à 1945, la Corée était une colonie du Japon. Il y a donc eu d’importants brassages entre les deux races. »

Pitt se décida à poser la question clef. Choisissant bien chaque mot, il demanda :

« Si vous deviez absolument vous prononcer sur la race à laquelle appartiennent ces hommes, que diriez-vous ?

— Je dirais simplement que l’ascendance de votre groupe est à 10 pour 100 japonaise, 30 pour 100 chinoise et 60 pour 100 coréenne.

— Il me semble que vous venez de me dresser la carte génétique du Coréen moyen.

— Libre à vous de l’interpréter ainsi, Mr. Pitt. J’ai été aussi loin que je le pouvais.

— Merci, professeur Perth, fit Pitt avec un sentiment de triomphe. Merci infiniment. »

 

Panique à la Maison-Blanche
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